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Si l’on vous demandait de citer un nom de clown sans réfléchir, il est probable qu’un nom masculin comme Pipo vous viendrait immédiatement. Et pour cause… On parle toujours d’un clown, jamais d’une clownE, comme si ce personnage était identifié dans les esprits comme étant un homme. 

S’agit-il d’un masculin d’usage, d’ordre grammatical et, partant, neutre, ou d’un héritage historique ? Au Rire Médecin, on compte pourtant plus de comédiennes que leurs alter-ego masculins…

Aux débuts du cirque (fin XIXème), alors que les personnages de clowns apparaissent, les femmes sont d’abord assignées aux rôles d’écuyère ou de danseuse sur la piste. Belles, altières, elles correspondent à ce que la société attend alors des artistes féminines.

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Rapidement pourtant, le duo clown-auguste appelle l’arrivée des femmes dans cette dynamique comique. Mais de manière cachée, presque honteuse. « C’est en 1928 qu’est mentionnée celle qui fut sans doute la première femme clown, Yvette Damoiseau-Spiessert, au cirque Pinder. Voilà comme on la dépeint alors : "Son grimage outrancier, ses grosses lunettes, sa défroque d’Auguste la camouflait si bien que le fait demeura à peu près inconnu du public "

Retenons le mot « camoufler », comme s’il avait été indispensable de taire qu’une femme avait revêtu cette défroque grotesque.». Pour ménager la vision du rôle social de la femme, les premières femmes clowns devaient donc cacher leur identité sexuelle, comme en atteste cet extrait de l’article Le clown et la demoiselle de Colette Cosnier-Hélard*.

Si le modèle masculin du clown persiste encore dans l’imaginaire, c’est sans doute parce que la société a freiné l’épanouissement des clowns femmes, tant les qualités originelles de ce personnage représentaient une transgression de la douceur et de la joliesse féminines attendues.

Historiquement, l’identité sociale de la femme (soumise, douce, tempérée) semble incompatible avec le caractère un peu pochard du personnage originel de clown. Ce-dernier représente la dégradation sociale, la maladresse, et véhicule d’abord une image un peu grotesque de virilité contrariée. Dans une société socialement divisée par genre, la femme ne pouvait endosser ce rôle. Et à travers le temps, les clowns eux-mêmes ont continué d’alimenter leur mythe en jouant de cette identité masculine marquée.

L’arrivée des femmes clowns a pourtant eu lieu, mais souvent en empruntant d’autres voies, comme les clowns à l’hôpital. Signe que les femmes font avancer nos idées reçues, le registre des clowns s’est, avec ces pratiques, agrémenté de caractéristiques perçues (à tort ?) comme typiquement féminines : instinct maternant, douceur, soin. Aujourd’hui, les hommes du Rire Médecin transfigurent aussi ces qualités dans leur art clownesque !

*A lire sur le sujet : La figure féminine du clown : enjeux et représentations sociales, de Delphine Cezard.
 

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