Découvrez le témoignage du Dr Yves Réguerre, CCA à l'hôpital Saint-Louis.
"Depuis 2 ans vous êtes là.
Depuis 2 ans vous apportez rire et chaleur à l'ensemble du service.
D'abord aux enfants que la maladie force à abandonner ce qui faisait jusque là leur quotidien : maison, école, amis ... Brutalement ils se trouvent isolés, loin de leur famille, frères, sœurs, amis. L'environnement change. Leur chambre est étrangère. En plus de l'agression physique que représente la maladie et les soins, et peut être bien plus que cela, l'agression psychologique « du déracinement », de la transplantation non désirée dans un milieu hostile frappe ces enfants avec violence.
Finis les rires espiègles de la crèche. Envolées les joyeuses bousculades de la cour d'école. Terminées sorties de classes, week-end en famille, vacances au ski ou à la mer. Il faut désormais vivre le quotidien au rythme des visites d'internes, d'infirmières, des perfusions et autres soins de kinésithérapie, radiographies ....
Qu'elles sont pesantes ces journées interminables ! Qu'elles sont tristes ces heures d'attente de soins ou de visites ! Qu'elle est lourde cette absence de rire d'enfant dans un milieu ou l'enfant est justement au centre du problème ! L'enfant à l'hôpital est comme privé de ce qui fait de lui un enfant : l'insouciance, le rire, la joie de vivre.
Alors, quand débarquent les clowns, car ils débarquent, je les ai vus, c'est tout cela qui entre d'un coup dans nos murs.
D'abord du bruit. Beaucoup de bruit. Des cris, des rires, de la musique, des portes qui claquent ... Ensuite du rêve, des sourires, des histoires, des chansons, des couleurs ....
C'est la vie qui entre par la grande porte et qui est déversée dans les couloirs à grands renforts de claquements de mains et de bonne humeur.
C'est la morosité et la déprime qui reculent. C'est la joie de vivre qui revient. C'est l'envie d'aller de l'avant, d'aller vers l'autre, de communiquer, en un mot de vivre qui, d'un seul coup vous frappent en pleine face. L'enfant se retrouve soudain remis à sa place d'enfant. Finit la place de patient ou de malade. Le revoilà tel qu'il était il y a seulement quelques jours. Enfin... Le revoilà guérit pour quelques heures de ce qui accompagne la maladie et l'hospitalisation, de ce mal insidieux qui les mine et que l'on nomme déprime.
« Il est terrible
Le petit bruit de l'œuf dur cassé sur un comptoir d'étain
Il est terrible ce bruit
Quand il résonne dans la mémoire de l'homme qui a faim. » Jacques Prévert"
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